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Chapitre 17 Les causes profondes de l'amertume d'abû tharr

Chapitre 17

Les causes profondes de l'amertume d'abû tharr

Il est établi qu'Abû tharr avait connu le Saint Prophète et ses Ahl-ul-Bayt de très près et qu'il était resté intimement lié à eux. Il avait pu ainsi voir très clairement chaque aspect de leur vie et apprendre beaucoup de choses à travers cette Noble Famille dans laquelle était descendue la Révélation et dont la conduite et les comportements étaient la traduction exacte et l'incarnation parfaite des préceptes de l'Islam. Il avait vu de ses propres yeux plus d'une fois le Saint Prophète rester à la mosquée le ventre creux et ses enfants affamés à la maison (100).

Abû Tharr avait vu également l'Imam `Ali travailler dur pour gagner sa vie, enveloppé de vêtements rudes et grossiers. Il l'avait entendu exhorter sa servante africaine, "Fidh-dhah":

«O Fidh-dhah! Nous les Ahl-ul-Bayt, n'avons pas été créés pour le monde de gains matériels, mais pour nous consacrer à l'adoration d'Allah et la propagation de Son Message, l'Islam. Il est de notre devoir de rehausser la morale de l'homme, d'allumer la lumière de l'Unicité d'Allah dans les coeurs des gens et de préparer le chemin de leur bien-être».

Abû Tharr avait également vu `Ali manger du pain d'orge sec, porter les sacs de farine sur son dos aux maisons des pauvres, des veuves, et des orphelins. Il l'avait entendu souvent dire: «O monde d'ici-bas! Va séduire quelqu'un d'autre que moi. J'ai divorcé avec toi». Il avait vu maintes fois les descendants du Prophète Mohammad (les Ahl-ul-Bayt) manger et partager leurs repas avec leurs serviteurs autour d'une même nappe. Il avait toujours présent à l'esprit l'état d'angoisse dans lequel s'était trouvé un jour le Prophète parce qu'il devait garder pendant une nuit quatre dinars du Trésor Public qu'il n'avait pas pu distribuer à leurs destinataires pendant la journée. Les mots suivants que le Saint Prophète lui avait adressés un jour résonnaient toujours dans ses oreilles et lui semblaient comme un enseignement anachronique par rapport à ce qu'il voyait maintenant sous le Califat de `Othmân. «O Abû Tharr! Même si je possédais une quantité d'or équivalente au Mont d'Ohod, je ne voudrais pas en garder un petit morceau sur moi».
 

Comment dès lors l'ami fidèle et le confident dévoué du Prophète pouvait-il se taire en voyant l'Islam se métamorphoser et les enseignements de ses gardiens foulés aux pieds?! Dès la disparition du Messager d'Allah tout ou presque avait changé. L'injustice et la tyrannie allaient rampantes. L'allégeance aux Califes s'obtenait de force, la maison des Ahl-ul-Bayt brûlée et on avait osé même forcer la porte de la maison de sa fille Fâtimah al-Zahrâ', La maîtresse des femmes du Paradis, et la faire tomber sur elle pour tenter d'arracher la prestation du serment d'allégeance à l'Imam `Ali(101).

`Ali était emmené, la corde autour du cou pour l'obliger à prêter serment d'allégeance et des grands Compagnons avaient été conduits à s'enfermer dans leurs maisons pour ne pas se compromettre devant Allah en obéissant à un pouvoir qui ne respecta pas la volonté du Messager d'Allah. Abû Tharr n'était ni par tempérament ni par formation religieuse quelqu'un qui acceptait l'injustice et le piétinement de la vérité sans réagir.

Pourtant, comme le Prophète (P) le lui avait recommandé, il s'était efforcé pendant un certain temps de s'armer de patience. Mais sa patience, sa ferveur religieuse, sa fidélité aux enseignements et Traditions du Prophète ne pouvaient s'éterniser, alors que la pompe royale des gouvernants, qui s'était substituée au mode de vie modéré et modeste du Saint Prophète, atteignit le sommet, que le favoritisme et le népotisme tribaux remplacèrent l'honnêteté et la piété islamiques, que les fonds du Trésor Public destinés aux pauvres et nécessiteux remplirent les poches des amis du pouvoir et firent des millionnaires parmi les proches parents du Calife, que le capitalisme gagna rapidement du terrain, faisant des pauvres, des indigents, des orphelins, et des veuves, des laissés-pour-compte.

Au début, Abû Tharr essaya de blâmer le Calife `Othmân, de le ramener à la raison et lui prodigua des conseils autant que faire se pouvait, mais `Othmân ne prêta aucune attention à ses conseils. Abû Tharr, qui ne pouvait manquer à son engagement devant le Prophète de rester le gardien vigilant de l'application des principes de l'Islam, décida de monter sur la scène publique et de dénoncer ouvertement les accrocs à la Loi commis par `Othmân, ainsi que la thésaurisation qui commencèrent à prendre une forme inquiétante que le Saint Coran condamne sans détour.

Comme Abû Tharr ne pouvait plus rester les bras croisés devant le pillage du Trésor Public par les proches parents de `Othmân, alors que des orphelins et des veuves mouraient de faim, il accéléra le rythme de ses prêches se déplaçant souvent pour alerter le plus grand nombre de Musulmans sur la gravité des violations des principes de l'Islam et les conséquences dangereuses de ces violations. Cela lui valut comme nous l'avons vu partiellement d'être tantôt exilé tantôt banni.

Il est tout à fait évident que la distribution de la richesse aux pauvres et nécessiteux est essentielle, mais il est aussi important de savoir sur quelle base cette richesse doit être répartie parmi les pauvres et d'autres catégories des Musulmans qui la méritent. Or, on sait que le Prophète avait distribué la richesse d'une façon égalitaire. Par exemple, pour les butins de guerre, il y prélevait 20% comme part d'Allah et de Son Prophète et les 80% restant étaient distribués entre les combattants à pied d'égalité. Personne n'avait le droit d'en avoir plus qu'un autre(102). Par ailleurs, les livres de Traditions nous apprennent que les tributs étaient distribués parmi les Musulmans le jour même de leur perception. La personne mariée en recevait le double de la part du célibataire.(103)

La même procédure était suivie par l'Imam `Ali, lorsqu'il accéda au Califat. Al-Hâfidh al-Bayhaqî relate qu'un jour l'Imam `Ali avait reçu de l'argent et autres articles d'Ispahan. Il les divisa en sept parts égales. Lorsqu'il remarqua qu'il restait un pain non distribué, il le divisa aussi en sept morceaux égaux dont il ajouta un à chaque part. Puis il tira au sort pour désigner parmi tous ceux qui y avaient droit sept personnes à qui les sept lots serait alloués(104). Un jour deux femmes étaient venues le voir. L'une d'entre elles était une femme libre, l'autre esclave. Il donna à chacune d'elle un peu de blé et quarante dirhams. La femme esclave repartit alors l'autre dit à l'Imam `Ali: «Tu m'as donné autant qu'elle! Pourtant c'est une femme esclave et non arabe alors que je suis une femme libre et arabe». L'Imam `Ali lui répondit: «J'ai eu beau cherché dans le Saint Coran, mais je n'y ai trouvé aucune raison de te considérer comme étant supérieure à elle».

Mohammad Radhî Zangipûrî écrit que sous le Califat de `Ali où le gouvernement suivait à la lettre le mode d'administration de l'époque du Prophète et distribuait la richesse sur une base d'égalité, la haute classe parmi les Compagnons fut mécontente de cette politique d'égalité. `Ali remarquant ce mécontentement, dit à l'adresse de cette classe: «Voulez-vous que je sollicite votre aide et appui en échange de l'injustice que je devrais faire à ceux pour lesquels je suis devenu gouvernant? Vous me demanderiez là de retenir leur dû pour vous en donner plus, en échange de votre appui. Par Allah! Tant que les contes de nuits continuent d'être racontés, et tant que les étoiles continuent leur mouvement, je ne ferai pas une chose pareille. Même s'il s'agissait de ma fortune personnelle, je l'aurais divisée à parts égales parmi les gens et pas autrement. Alors comment pourrais-je ne pas observer l'égalité lorsqu'il s'agit de la propriété d'Allah?! Sachez que donner de l'argent sans compter et être généreux sans respecter le droit est une forme de gaspillage et d'extravagance qui rehausse, certes, le donneur dans ce bas-monde, mais qui le rabaissent, en revanche, dans l'Au-delà»(105).

`Ali conscient, que la distribution de la richesse des Musulmans, d'une façon égalitaire, parmi les pauvres, les nécessiteux et toutes autres catégories d'ayants-droit est un principe islamique inviolable, déclara dès qu'il accéda au Califat: «Vous êtes les serviteurs d'Allah et la richesse appartient à Allah. Elle sera distribuée d'une façon égalitaire parmi vous sans aucune distinction ni discrimination»(106).
 

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