Mar05072024

mise a jour :Dim, 20 Aoû 2023 9pm

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Le do'â' légal est celui qui a été formulé par le Législateur islamique, et qu'on trouve parsemé ça

Le do'â' légal est celui qui a été formulé par le Législateur islamique, et qu'on trouve parsemé ça et là dans les plis de telle ou telle autre sourate du Coran, comme celui-ci :


«Notre Seigneur! Nous avons entendu un crieur crier pour nous appeler à la Foi» (Sourate Âle 'Imrân, 3 : 193).

De même, le do'â' légal est représenté surtout (et c'est le cas de la plupart des do'â' connus et courants) par les Textes rapportés des Imams d'Ahl-ul-Bayt (p) et composés par eux. Ils sont tellement nombreux et variés qu'on les a compilés dans des corpus ou des ouvrages encyclopédiques(2). Nous les aborderons plus loin. Pour le moment, nous essayons d'exposer les caractéristiques générales du do'â' légal, et surtout son aspect linguistique.

La première chose qui attire l'attention dans le do'â', c'est son caractère artistique ou esthétique. En fait tous les Textes légaux (divins ou d'inspiration divine), et pas seulement le do'â', se distinguent par ce trait esthétique. Le Coran s'en détache évidemment par sa rhétorique inégalable et miraculeuse. Ceci dit, sachant que le Texte légal a pour but premier la communication des principes et des enseignements d'Allah à l'humanité, on est en droit de se demander quel est le rapport entre cette opération de communication et le langage utilisé à ce propos ?

Dans le genre "Do'â'" l'élément esthétique ou artistique est tantôt dominant, tantôt à peine perceptible, tantôt remplacé par un style direct. Il arrive même que le langage usé soit quotidien ou populaire. Mieux, il n'est pas exclu de trouver parfois dans le Texte du do'â' l'emploi par l'auteur (l'Imam) d'un vocabulaire étranger. Cette variété de style confirme ce que nous avons déjà dit : le but essentiel du do'â' est la communication de la pensée à autrui ; le style ou le langage n'a qu'un objectif secondaire. Pourquoi alors le caractère esthétique prévaut-il dans toutes les formes au vocatif du Texte légal ? Étant donné que l'art contribue - surtout par deux de ses volets : le son et l'image -, à la pénétration et à l'approfondissement des idées que le Texte vise, la nécessité de la communication de celles-ci exige que le Texte s'appuie sur un langage artistique. Et c'est ce qui caractérise le Texte de la plupart des do'â', Texte sous-tendu d'une façon remarquable par les éléments son et image. Ce trait esthétique qui marque en général toutes les formes du do'â', qu'il soit tout court, ne comprenant qu'un ou deux paragraphes, ou très long, s'étendant sur plusieurs pages. Dans les deux cas il use de tous les éléments du style esthétique, dont notamment le son et l'image.

 

À la différence du do'â' légal (qui se caractérise par son langage littéraire, son style esthétique et le caractère inchangeable de sa composition), le do'â' humain, ou formulé par le commun des mortels, ne comporte ni règles spécifiques ni traits caractéristiques. La rhétorique du premier type du do'â' cède la place à la spontanéité du langage dans le second.

La raison en est que le do'â' humain se réduit à une simple une demande de la satisfaction d'un besoin particulier qui concerne soit le priant lui-même, soit lui et d'autres. La demande dans les deux cas est dictée par une situation improvisée ou préméditée qui ne requiert que l'imploration d'Allah d'exaucer cette demande. Dès lors il importe peu que le priant formule sa prière de demande avec des mots du parler de tous les jours ou dans un arabe littéral, dans un style soigné ou ordinaire, d'une façon audible ou à voix basse, mentalement ou avec une parole prononcée etc.

Mais sachant que les do'â' formulés par les Infaillibles (Les Ahl-ul-Bayt -P-) comprennent souvent la demande de la satisfaction de besoins humains variés, ainsi que de besoins généraux qui contiennent les besoins individuels spécifiques, ne vaudrait-il pas mieux dès lors nous y limiter et éviter de formuler le Texte du do'â' nous-mêmes ?

La "spécifité" de certains besoins, l'impossibilité, parfois, de mémoriser le do'â' légal ou de l'obtenir, l'émergence continuelle de nouveaux besoins, ainsi que l'importance pour l'homme de communiquer par tous les moyens disponibles avec le Miséricordieux, tout cela conduit le croyant à s'adresser à Allah dans n'importe quel langage qui exprime son besoin.

Puisque le do'â' comprend également le thikr (les différents genres de l'invocation d'Allah) ou d'une façon générale toutes formes de communication avec Allah, est-il permis au croyant de formuler également une «invocation» spécifique lui-même ?

Certes le do'â' comprend le thikr avec lequel il a des points communs, mais il y a aussi des points de divergence. Ce qui importe ici de souligner, c'est que le croyant doit respecter dans le do'â', le thikr et toutes les autres formes de communication au vocatif avec Allah, le Texte légal, surtout lorsque celui-ci comporte des formules qu'on doit répéter un nombre déterminé de fois, ou la répétition d'un ou de plusieurs paragraphes donnés, nombre et répétition etc. qui recèlent sûrement des secrets que nous ne pouvons appliquer dans notre formulation personnelle du do'â' et du thikr.

Lorsque nous dépassons l'aspect de la formulation verbale ou de l'élocution du do'â', nous sommes confortés alors à la question de l'état psychologique, affectif ou intérieur du priant, question nettement plus importante que la précédente (la formulation verbale, la diction du do'â'), vu que la communication doit avoir pour source essentielle le cur, comme en témoignent les diverses recommandations de la Charia.

Concernant les traits caractéristiques du contenu ou de l'aspect affectif du do'â', la première chose qui attire l'attention, c'est la prédominance de l'affectivité. Pourquoi cette prédominance ?

On sait que l'art de discourir comporte trois éléments dont la place et l'importance varient selon la nature ou le genre auquel appartient le discours. Ces éléments sont : la logique, l'imaginatif, et l'affectif. Ce qui nous intéresse ici, c'est surtout le dernier élément, la charge affective qui l'emporte sur les deux autres dans le genre de do'â'. Pour mieux comprendre le pourquoi de cette prédominance de l'aspect affectif dans le do'â', on peut se référer au discours en général, lequel, s'adressant à un public, et cherchant à le sensibiliser pour faire passer le message à communiquer, requiert un ton pathétique ou une charge affective susceptible d'émouvoir et de toucher l'auditoire. En revanche cette préoccupation d'affectivité n'est pas nécessaire dans les genres lettre, dissertation ou article etc. où le ton affectif s'estompe pour laisser place au raisonnement et à la logique. Mais, le do'â' n'est pas un discours, et ne s'adresse pas à un public à conquérir, dira-t-on. Quelle y est donc la nécessité de cette affectivité ?

Rappelons que le do'â' consiste en la demande de la satisfaction d'un besoin. Or lorsqu'on se trouve dans une situation de besoin impérieux et pressant que l'on a hâte de satisfaire, on ne va pas user d'un langage de chiffres pour l'exprimer, mais plutôt d'un ton pathétique et émouvant. Ceci en supposant que l'on a affaire à un individu ou une institution ordinaire. Que dire alors, s'agissant du Maître de l'univers, le seul à posséder le moyen de la satisfaction absolue de tous nos besoins! Car là on se sent diminué devant la Puissance absolue, d'une part, et devant la Cause principale de la satisfaction de notre besoin - et non devant un simple intermédiaire ou moyen - d'autre part! Et que dire encore si, en plus, par malheur (et c'est souvent le cas) nous ressentons à ce moment le manquement aux devoirs de piété envers Celui à qui nous sollicitons le secours et l'aide (la satisfaction de notre besoin). Dans une telle situation, il est normal que le priant se trouve au comble de l'émotion, et même au bord des larmes.

Ici une question pertinente se pose: pourquoi les Textes islamiques nous recommandent-ils les lamentations ou du moins la feinte des lamentations pendant le do'â'? Est-ce uniquement pour le besoin du do'â', ou bien y a-t-il une autre raison ?

En fait, les lamentations sont très recommandées non seulement pendant le do'â' mais en général. Les raisons qui pourraient expliquer ces recommandations sont nombreuses. Notons tout d'abord que généralement les larmes de l'être humain ne coulent que dans des situations exceptionnelles, par exemple lorsqu'on perd un proche chéri. Cela dénote que la rareté de ce phénomène demeure fonction de la nature du cur humain dont l'accélération ou le ralentissement des palpitations dépendent des situations purement affectives qui n'ont rien à avoir avec les intérêts matériels de la vie passagère. Mais, on peut objecter qu'il arrive souvent qu'on verse des larmes à la suite d'une perte d'argent, d'un intérêt matériel, ce qui démentirait le caractère purement humain des lamentations.

Il ne faut pas perdre de vue qu'il y a une différence entre la lamentation en tant qu'état affectif ou sentimental, et les raisons qui engendrent cet état. Or, nous traitons ici du pleur uniquement en tant qu'état affectif. Quant à son pourquoi, nous nous en tenons, en tant que croyants, aux recommandations islamiques qui nous demandent de nous mettre dans un état affectif, émotionnel, de recueillement lorsque nous implorons Allah, l'Absolu, ou en d'autres termes la lamentation ici est un rapport avec Allah et non avec nos semblables. Mais ce qui est plus important encore c'est que l'Islam nous recommande, comme nous venons de le dire, d'accomplir le do'â' dans un état de tendresse dans la mesure où le cur, lorsqu'il s'attendrit, la rouille des affaires de la vie d'ici-bas s'en efface et l'aspect humain s'y illumine. Car nous savons tous que le pleur débute avec le commencement de l'attendrissement ou de l'émotion et s'intensifie avec son intensification. Lorsque nous pleurons d'un péché que nous aurions commis ou d'un manquement à notre devoir envers Allah, ou encore par désir d'Allah etc. notre gémissement découle dans tous ces cas de l'attendrissement. Par conséquent, les causes des pleurs ici sont en rapport avec le Créateur et n'ont aucun lien avec un quelconque intérêt personnel ou motif mondain passager.

En conclusion, l'attendrissement est l'état affectif que nous vivons en accomplissant le do'â'. C'est pourquoi, plus notre cur s'attendrit plus le degré de notre lamentation augmente.

Il nous reste à rappeler que les Textes islamiques nous recommandent d'une part de nous efforcer de verser ne serait-ce qu'une seule larme, et à défaut et d'autre part, de feindre (affecter) de pleurer! Quel pourrait être le secret de cette recommandation ? Demander à quelqu'un qui n'a pas la capacité de pleurer de faire semblant, ou à quelqu'un qui ne peut pleurer normalement de verser ne serait-ce que quelques larmes, n'est-ce pas l'incarnation de l'entraînement à l'adoucissement du cur ?

En effet, selon le courant psychologique contemporain, le behaviorisme, pour apprendre ou adopter un comportement donné, il faut s'exercer à l'affectation de ce comportement. «Il soutient que les réactions émotionnelles sont le résultat d'un apprentissage au même titre que les autres aptitudes».(3) Certes il nous importe peu le point de vue laïc sur l'apprentissage du comportement du moment où nous nous orientons vers Allah pour apprendre le comportement religieux, mais nous pensons que la corroboration des enseignements célestes par des références et des expériences terrestres pourrait renforcer la conviction de certains esprits faibles et sceptiques de la pertinence des recommandations de l'Islam. Ceci dit, voyons ce que l'Imam Ali (p) dit à ce propos : «Si tu n'es pas indulgent, affecte de l'être».

Il ne fait pas de doute que l'indulgence n'est que l'une des qualités parmi bien d'autres que comporte la longue liste des qualités morales, et que ce qui vaut pour cette qualité vaut aussi pour les autres. Donc on peut en inférer facilement que l'être humain est capable d'apprendre et d'adopter n'importe quel comportement (dont et en l'occurrence, le pleur) en s'y entraînant (en faisant semblant de pleurer). Toutefois, on est en droit de se demander de quelle façon on pourrait affecter de pleurer et comment s'efforcer de verser quelques larmes, alors que le pleur est un processus plus ou moins involontaire suscité par un état émotionnel ?

Tout d'abord il faudrait rappeler une évidence, à savoir que la feinte de pleurer consiste à produire un bruit qui fait croire à un auditeur qu'on est en train de pleurer réellement. Mais il faut prendre en considération le fait que cette affectation doit être accompagnée d'un état affectif, c'est-à-dire la représentation dans l'esprit du pourquoi du do'â que le priant est en train d'accomplir ou de formuler, ou en d'autres termes, on doit être conscient de ce qu'on implore, d'une part, et en être ému d'autre part. Supposons que nous voulions implorer Allah de nous pardonner un péché. Auquel cas nous devons être conscients que nous avons commis ce péché et en même temps éprouver du regret de l'avoir commis. Et c'est cela que nous appelons être ému par la situation.

Toutefois, dans un tel cas le sentiment de culpabilité et le regret ressenti flottent à la surface et ne descendent pas au fond, ou en d'autres termes n'atteignent pas le degré de fusionnement. Et lors bien même que nous éprouverions un profond regret du péché commis, nous ne pourrions peut-être pas pleurer, pour des raisons que nous expliquerons plus loin. Ce sur quoi nous voulons attirer l'attention ici, c'est que dans le cas de figure décrit, (la situation ou notre état ne nous permet pas de verser de larmes réelles), la simple affectation répétitive du pleur (tout en ressentant notre péché et en étant conscient) produit ses effets progressivement et finira par engendre un nouvel état émotif : la lamentation réelle; c'est dire que le processus d'apprentissage d'un caractère débouche sur l'acquisition dudit caractère.

Mais d'aucuns objecteraient que le contraire est vrai et que le caractère naturel prévaudrait toujours sur le caractère acquis, en avançant comme preuve le fait qu'on puisse rendre inoffensif un animal féroce, pendant un moment, mais que dès qu'il se trouve devant un nouveau stimulus (une proie) il reviendrait à son état sauvage et de férocité; ce qui signifierait que l'affectation du pleur ne déboucherait pas forcément sur le pleur réel !

À cette objection nous répondons qu'Allah a créé l'homme selon un mécanisme souple de telle sorte que son comportement soit sujet à modification et à changement. Autrement, le pécheur ou le dévié en général ne pourrait pas se réformer ou corriger sa déviation. Le changement ou la modification du comportement s'opère par l'un des deux facteurs suivants: l'un c'est la prise de conscience intense (du défaut, du péché) - lorsqu'on se livre à une sorte d'introspection ou d'analyse du comportement incriminé et la reconnaissance consciente de notre faute, par exemple - l'autre c'est le processus de l'entraînement au nouveau comportement. C'est là une règle générale du comportement humain. Mais font exception à cette règle des cas particuliers dans lesquels la prise de conscience ne se produit pas, et par voie de conséquence l'entraînement à l'acquisition du comportement positif (désiré) trébuche et ne donne pas le résultat escompté. Quels sont les raisons d'un tel échec ?

La réponse détaillée à cette interrogation risquerait de nous entraîner dans un long développement et une longue analyse du comportement humain, et de nous écarter par conséquent du vif de notre sujet, qu'est le do'â'. Cependant on peut dire succinctement que deux facteurs pourraient expliquer cet échec : l'un biologique ou héréditaire, qui empêche la personnalité de changer de caractère, l'autre, psychologique, et c'est sur ce dernier qu'il importe d'attirer l'attention: si un individu persiste dans son comportement dévié, Allah finira par "sceller" son coeur. C'est du moins ce dont nous avertissent de nombreux versets coraniques et de hadiths des Infaillibles (P). En d'autres termes, Allah sachant préalablement qu'un tel individu ne se défera pas de turpitudes, Il «scelle» son coeur. Mais il va de soi qu'il s'agit ici des cas particuliers et des individus particuliers. En dehors de ces cas spécifiques le processus de l'entraînement finit par faire acquérir au croyant le comportement ou le caractère recherché, en l'occurrence, l'aptitude aux pleurs pour celui qui a des difficultés à verser des larmes.

Passons maintenant à une autre recommandation islamique sur le sujet. Selon cette recommandation, nous pouvons pendant le do'â' nous représenter ou remettre en mémoire tout événement ou péripétie de notre vie susceptible de susciter notre émotion et d'arracher nos larmes (la perte d'un bien-aimé, la disparition d'un proche chéri etc.). L'explication de cette recommandation reste la même : adoucir nos coeurs, en arracher la dureté et nous mettre dans un état de recueillement et d'humilité propice à l'imploration d'Allah, dans une situation qui correspond à notre position d'éternel solliciteur ou de créature faible et impuissante devant la Toute-Puissance et la Majesté du Créateur, comme nous le rappellent sans cesse le Coran et la Sunna. Mais puisque cet état affectif exprime une sollicitation, une requête, le solliciteur est en droit de s'attendre à ce que son do'â' soit exaucé, sa requête aboutisse et son besoin satisfait. Cette attente semble d'autant plus vraie et légitime qu'Allah nous promet dans le Coran «Appelez-moi, Je vous répondrai»(4) et «Je réponds à l'appel de celui qui Me prie quand il Me prie»(5) etc... et que les Infaillibles (P) n'ont cessé de confirmer. Mais pourquoi alors, cette attente est parfois déçue, la réponse à la demande et l'exaucement de la prière ne se pointent pas toujours ?

Pour répondre à cette interrogation, commençons par nous poser une autre question: la nature de la vie humaine permettrait-elle de satisfaire d'une façon absolue tous les besoins de l'humanité ou même d'une façon (une satisfaction) relative? Évidemment la réponse est négative pour le premier volet de la question, positive pour le second, étant donné que la satisfaction des besoins ne peut se faire que de deux façons qui n'acceptent pas une troisième : soit la satisfaction absolue soit la satisfaction relative. Toutefois la réponse au second volet devrait être nuancée ou relativisée, car la satisfaction relative demeure elle-même relative, comme nous l'expliquerons plus loin, après que nous aurons tout d'abord traité du rapport entre le do'â' et la satisfaction des besoins en général. Nous avons déjà indiqué que la nature de la vie ne permet pas la satisfaction de tous les besoins de l'humanité. Le monde est fait ainsi. Il nous reste à noter maintenant qu'il y a deux sortes d'aspirations ou de besoins : besoins légaux (d'après la législation islamique) et besoins illégaux. L'exploitation ou l'asservissement d'autrui par exemple est un besoin illégal, mais l'aspiration à la possession d'une grande maison, par exemple est un souhait légal. Même les besoins légaux sont de différentes catégories: les besoins neutres (permis), les besoins détestables, les besoins recommandés, les besoins obligatoires. Donc l'exaucement ou non du do'â' a un rapport évident (comme on le verra) avec la catégorie des besoins légaux qu'il comporte.

Il faut avoir conscience avant tout qu'Allah a créé l'homme afin qu'il exerce une fonction que le Ciel lui a fixée ou qu'il passe une épreuve, un test ou un examen : comment se comporter vis-à-vis des enseignements du Créateur ? Or l'épreuve implique qu'il "reporte" la satisfaction de certains besoins ou y renonce. En effet Allah a déposé dans l'homme une série d'instincts ou de pulsions dont Il a prescrit des modes de satisfaction spécifiques, et Il lui a demandé d'"ajourner" la satisfaction de ceux (des besoins ou pulsions) qui sont illégaux. Il va donc de soi que si nous implorions Allah, dans notre do'â', de nous accorder les moyens le pouvoir d'agresser autrui ou de nous montrer orgueilleux, Il ne nous les accordera pas, car une telle demande est fondamentalement contraire à Ses Principes. C'est là l'évidence même. Mais pourquoi alors le non-exaucement de besoins légaux ?

Là encore la nature de la vie humaine et, la fonction de l'homme telle que l'a fixée le Créateur et consistant foncièrement à passer l'épreuve de la vie terrestre, se trouvent derrière les cas du non-exaucement de besoins légaux. En effet, imaginons que vous vouliez devenir un chef d'état, l'homme le plus riche de la planète, ou bien vous lier à la plus belle femme du monde. Croyez-vous que la nature de la vie vous le permette ? Si vous étiez le seul à avoir imploré Allah de vous accorder une telle faveur, votre imploration aurait pu être exaucée. Mais étant donné que tout le monde pourrait nourrir cette même ambition pour une place unique, il est normal que votre besoin ou ambition, même légal et légitime, ne pourrait être réalisé d'une façon absolue. Mais vous objecteriez que même en priant pour réaliser des ambitions plus modestes ou pour la satisfaction de besoins dont peut jouir tout le monde et qui ne heurtent pas les intérêts d'autrui, tels que la bonne santé, la sécurité, la longue vie, l'aisance, l'amour des gens, la mort des ennemis, la facilitation de nos affaires administratives etc, nos prières ne sont pas exaucées systématiquement et d'une façon absolue, lors bien même que ces besoins sont formulés non pas par nous mais par les do'â' légaux (prescrits par les Textes islamiques) eux-mêmes !

Nous répondons à cette objection que toute l'humanité aspire naturellement à la satisfaction de tels besoins et que si Allah exauçait le voeu de tous les hommes d'avoir une bonne santé par exemple, on assisterait à un immense changement social: la disparition de la médecine. En outre, notre voeu d'être aimés par tout le monde ou de voir nos ennemis anéantis, déboucherait, s'il est exaucé, sur une modification radicale de la structure humaine de telle sorte que les hommes se transformeraient en anges terrestres et on vivrait dans des sociétés sans agression, ni égocentrisme, ni haine, ni jalousie, ni conflits, ni rivalité etc. Une telle chose ne s'est jamais produite dans l'histoire de l'humanité.

Ayant montré que la nature de la vie sociale ne permet pas la satisfaction absolue de nos aspirations, passons à présent à l'autre facteur qui empêche la réalisation de cette satisfaction absolue par le biais du do'â', à savoir la nature de notre fonction ou tâche existentielle (la lieutenance sur la terre). Nous avons déjà dit qu'étant donné que la raison d'être de notre existence sur terre est le passage d'une épreuve, ce passage est marqué plus par les difficultés de la vie que par son aisance, plus par la «frustration» que par la «satisfaction». Bien plus, la satisfaction est fondamentalement réservée à l'autre monde, à la Vie future, alors que notre vie terrestre n'est qu'un passage ou un pont vers celle-là. Ceci nous sommes tous censés le savoir puisque le Noble Coran et les divers Textes islamiques n'ont de cesse de nous le rappeler. En effet ces Textes nous indiquent que l'homme est créé dans «les peines», dans les difficultés, et que la foi du croyant se mesure par les épreuves et les difficultés qu'il traverse. La Sunnah nous met en garde contre la satisfaction absolue, et nous avertit par exemple que si le corps ne tombait pas malade, il risquerait de devenir pétulant, et que si le ventre est rassasié, il conduire à l'impiété et à l'injustice. Ce genre d'instructions et recommandations dénotent que le but du bon croyant pratiquant n'est pas la satisfaction (de besoins) mais l'accomplissement des meilleurs des actes conformément aux Principes célestes.

Là encore une question se pose et s'impose : si comme nous venons de le voir, c'est la frustration et non la satisfaction qui est le trait saillant de l'épreuve que le croyant doit traverser, quelle est la raison d'être des do'â' qui implorent et réclament la satisfaction des besoins du priant? Si l'exaucement absolu de nos prières ne concorde ni avec la nature de la vie ni avec la nature de notre tâche existentielle qui requiert l'endurance des difficultés de la vie, pourquoi les do'â' nous invitent-ils à prier et nous promettent-ils que nos prières seront exaucées ?

En fait notre interrogation comporte deux questions :

1- Pourquoi nous est-il réclamé de prier Allah de satisfaire nos besoins, alors que la frustration vaut mieux que la satisfaction pour nous selon les critères célestes ?

2- Pourquoi les Textes islamiques nous promettent-ils l'exaucement de nos prières, alors que celles-ci, restent parfois ou souvent inexaucées ?

Concernant la première question, il faut garder présent à l'esprit que la pratique du do'â', abstraction faite de son exaucement et de son non-exaucement, procure une série d'avantages spirituels: le do'â' sert à nous arracher à notre inconscience existentielle, c'est-à-dire à nous sortir de nos occupations terrestres pour nous mettre en relation et en contact avec le Créateur. Or, il ne faut pas sous-estimer l'importance primordiale de ce contact, aussi bref soit-il. Certes le contact avec Allah doit être permanent et ininterrompu, comme en fait preuve, l'élite des serviteurs pieux. Mais, même limité au laps de temps que dure la Prière de demande, ce contact avec le Miséricordieux revêt une importance capitale que nous ne devons guère négliger. D'autre part, il ne faut pas oublier que notre subsistance, notre santé, notre sécurité et tous nos autres besoins pour la satisfaction desquels nous prions, demeurent tous entre les mains d'Allah. En accomplissant le do'â', nous sortons de notre intoxication terrestre et prenons conscience de l'appartenance de l'univers, dans sa totalité, à Allah. Certes le mobile premier de notre Do'â' réside dans certains besoins que nous ressentons et dont nous recherchons la satisfaction, mais une fois que nous recourons au do'â' et que nous prenons conscience qu'Allah est capable de pourvoir à nos besoins, cette conscience nous conduit inconsciemment et par l'association des idées à réfléchir sur la Toute-Puissance divine et à Son Pouvoir absolu sur le cheminement et le mouvement de l'Univers tout entier. En un mot, notre conscience de la capacité d'Allah de satisfaire nos besoins limités et ponctuels, suscite, grâce au do'â', notre conscience de la Capacité et du Pouvoir divins absolus, et c'est là un acquis spirituel de taille.

Nous nous permettons de rappeler au passage, un troisième avantage spirituel que procure le do'â' et que nous avons évoqué plus haut, à savoir que notre sentiment de dialoguer avec le Créateur de l'Univers suscite un sentiment de fierté.

Enfin un quatrième avantage, c'est que lorsque nous sommes dans le besoin, le fait d'exprimer notre besoin, est en soi un motif de soulagement, un moyen de nous défouler et d'apaiser les tensions liées à ce besoin. C'est là donc un avantage psychologique d'une importance indéniable, sachant que la gravité ou la bénignité des difficultés et des épreuves de la vie dépendent de la manière dont nous les prenons ou ressentons, ou en d'autres termes de leur reflet sur notre âme ou tout simplement de notre état d'âme.

Moralité, abstraction faite de son exaucement ou non, le do'â' ou la Prière de demande constitue en soi un exercice spirituel qui joue un rôle important dans le raffermissement de la foi du croyant, et dans l'équilibre de sa personnalité.

Il y a évidemment d'autres avantages spirituels liés à d'autres aspects du do'â', dont nous parlerons dans leurs contextes respectifs. En attendant, nous sommes restés encore sur notre faim concernant un angle important de notre précédente interrogation, à savoir comment concilier entre les Textes qui nous recommandent de présenter nos requêtes et de réclamer leur réalisation, et ceux qui nous invitent à endurer les difficultés de nos besoins (les difficultés liées à la non-satisfaction de nos besoins) ?

La réponse à cette interrogation requiert le rappel et l'exposé de certaines vérités dont:

- Soulignons tout d'abord la légitimité de notre Prière de demande de la satisfaction de nos besoins terrestres ordinaires (la santé, les moyens de subsistance, la sécurité etc.) tels qu'ils sont mentionnés dans les do'â' légaux eux-mêmes, tout en notant que dans ces besoins, ce qui se rapporte à la vie terrestre est inséparable de ce qui a trait à la Vie future, comme nous l'expliquerons, le moment venu.

- Tenir compte du degré de conscience du priant quant au sens de son existence sur terre: l'importance qu'attache un serviteur à un tel ou tel autre besoin peut être moindre ou même inexistante chez d'autres.

- Il n'y a pas d'opposition ou de contradiction entre le fait de réclamer la satisfaction d'un besoin et l'endurance des difficultés, lorsqu'on observe les exigences de la Sagesse divine.

Notre exposé de ces vérités pourrait être empreint de flou. Essayons donc de le clarifier en commençant par ce dernier point : la non-opposition entre notre prière pour la satisfaction de nos besoins et notre devoir de supporter les difficultés, lequel signifie que lorsque nous rencontrons une épreuve nous devons l'accepter et ne pas nous laisser en être affligés, afin de mériter la récompense spirituelle décernée pour notre endurance. Or, évidemment le mérite de cette récompense ne signifie nullement qu'il nous est interdit d'implorer Allah d'enlever cette difficulté, mais seulement de faire montre de patience et d'endurance. Là une question se pose, lorsqu'on se réfère à un Texte islamique qui dit: «Le Jour du Jugement l'homme souhaitera qu'il eût été découpé avec des ciseaux dans sa vie terrestre pour gagner plus de récompenses spirituelles dans la Vie future»: ce Texte ne signifie-t-il pas que devrions souhaiter dans notre vie présente être emprisonnés dans nos épreuves et difficultés, et nous abstenir par conséquent de prier Allah de nous en sortir, dans l'espoir de prolonger ou de perpétuer ces difficultés et obtenir ainsi davantage de récompenses spirituelles ?

La réponse à cette question est que la précédente avec un petit ajout: ces Textes et recommandations visent à encourager le croyant à endurer les difficultés et à ne pas en être affligé, si dures soient-elles. Ce faisant le croyant finira par prendre conscience de la valeur spirituelle de telles difficultés, ce qui allège et atténue leurs reflets ou leur effet sur lui et lui permet de maintenir son équilibre psychologique. En d'autres termes le croyant prend conscience que plus il endure des difficultés, plus il obtiendra de récompenses spirituelles, ce qui augmente son aptitude à supporter les difficultés, à garder le moral intact, et à ne pas tomber en proie au désespoir et à la déprime. Cependant, tout ceci n'empêche pas, comme nous l'avons dit, le croyant de continuer à prier Allah d'aplanir ses difficultés.

Naturellement, et là c'est une remarque qui s'impose, lorsque la conscience spirituelle (le degré de la piété) du croyant augmente, il pourrait formuler sa Prière de demande d'une autre manière, face aux difficultés de la vie en confiant son sort totalement à Allah et en L'implorant de l'aider à les supporter, si leur continuation et leur aggravation sont dans son intérêt, et de les enlever, autrement, quand Il le décide, comme le font les Prophètes, les Imams et l'élite des croyants pieux.

Récapitulons : Face aux difficultés et aux épreuves, il nous est recommandé en premier lieu et en principe de recourir au do'â', autrement et à défaut, de faire preuve d'endurance et de patience; mais rien ne nous empêche évidemment d'adopter ou de combiner les deux attitudes : le do'â' et l'endurance.

Maintenant essayons de développer ou de compléter la réponse à la seconde partie de notre interrogation initiale, à savoir pourquoi les Textes islamiques nous promettent l'exaucement de nos prières, alors que nous remarquons qu'il arrive parfois ou souvent que nos do'â ne sont pas exaucés?

Ce genre de questions ont été posées aux Infaillibles (P), auxquelles ils ont fourni diverses réponses. Nous avons déjà noté que la nature de la fonction de l'homme sur terre, et la nature des sociétés ne permettent pas la satisfaction absolue de tous nos besoins. Nous nous limitons donc à mentionner la réponse des Infaillibles (P) relativement au non-exaucement de nos besoins légitimes.

Le premier facteur de ce non-exaucement que les Textes des Infaillibles invoquent, c'est le péché. Ainsi, selon un Hadith attribué au Prophète (P), un jour alors que le Prophète Mûsâ (P) passa près d'un homme qui implorait Allah en état de prosternation, Allah lui révéla à peu près ceci :

«Même s'il (cet homme) continue à se prosterner jusqu'à ce que son cou se brise, Je n'exaucerai pas sa prière, avant qu'il ne se départe de ce que Je déteste pour s'adonner à ce que J'aime...».

Selon l'Imam al-Bâqer (p) :

«Un serviteur prie Allah de satisfaire son besoin. Allah dit alors à l'Ange: "Ne le satisfais pas! Prive-l'en plutôt, car il s'est exposé à Ma Colère ! "»

Donc, le fait de s'adonner au péché constitue un obstacle principal à l'exaucement du do'â'.

D'aucuns pourraient objecter: étant donné que seuls les Prophètes (P), les Infaillibles (P) et l'Élite des croyants sont à l'abri du péché, cela ne reviendrait-il pas à dire qu'en règle générale, la Prière de demande du commun des mortels est censée ne pas être exaucée, vu que les êtres humains ne sont pas infaillibles ?

À cette question les Textes islamiques relatifs aux facteurs de l'exaucement du do'â' que nous aborderons plus loin nous permettent de répondre que la repentance, le regret, l'abandon du péché, la reconnaissance du tort, le sentiment de culpabilité etc... tout ceci milite en faveur de l'enlèvement de l'obstacle dressé par le péché devant l'exaucement de nos prières. En d'autres termes le simple fait de regretter le péché commis, ou de former intimement l'intention de ne plus le commettre, ou encore de reconnaître devant Allah notre tort suffit en principe à effacer le mauvais effet de notre péché sur l'exaucement de nos prières.

Le second facteur important du non-exaucement du Do'â' que les Textes islamiques mentionnent c'est la distraction du coeur, c'est-à-dire le fait d'accomplir nos prières de demande avec un coeur ou un esprit distrait. Ce facteur est d'autant plus évident que nous devrions savoir que le do'â' est un dialogue unilatéral avec Allah, et que par conséquent il est normal que nos requêtes ou doléances ne puissent aboutir, si nous nous contentons de les formuler verbalement et sans y mettre nos coeurs et nos âmes, ou de prononcer de la bouche des signifiants sans les rattacher à leurs signifiés au fonds de nous-mêmes et dans notre esprit.

Il y a d'autres facteurs du non-exaucement du do'â' que nous mentionnerons, dans leurs contextes respectifs. En attendant nous nous devons de souligner que ces facteurs ne sont pas seulement négatifs, mais peuvent être également positifs. Mais qu'est-ce qu'un facteur positif du non-exaucement du do'â'? Si, le non-exaucement du do'â' dénote parfois, comme nous venons de le constater, un signe négatif (nos péchés, nos coeurs distraits) il pourrait receler dan le cas contraire (la repentance ou l'absence de péché, la présence du coeur) une cause positive, la Grâce et la Miséricorde d'Allah. En effet, les Textes islamiques nous apprennent que si Allah aime un serviteur accomplissant le do'â', Il dit à l'Ange: «Empêche ou retarde la satisfaction de son besoin, car J'aime écouter sa voix et son appel...» et que si au contraire Il le déteste, Il commande à l'Ange: «Exauce son voeu, car Je déteste sa voix...».

Quelle belle nouvelle que celle que nous révèlent là ces Textes! Quel serviteur ne sauterait-il pas de joie et ne se sentirait-il pas hautement honoré en apprenant que le Tout-Puissant, le Miséricordieux, écoute sa voix et aime l'écouter encore plus! Devant un tel cadeau incomparable et un tel don inestimable que valent tous les besoins et artifices de la vie terrestre! Ou comme le disent les Imams (p) : «Que vaut la vie d'ici bas !?».

Là une autre question surgit qui découle de ce qui vient d'être dit: le fait qu'Allah aime écouter la voix du croyant, signifierait-il la non-satisfaction de son besoin ? Les Textes des Infaillibles (P) nous répondent à ce sujet que dans cette éventualité Allah soit retarde la satisfaction de sa demande, soit le lui épargne pour la Vie future. Ainsi l'Imam al-Sâdiq (p) dit:

«Lorsqu'Allah aime un serviteur pieux (qui L'implore) à l'Ange: "Satisfais le besoin de Mon serviteur, mais sans hâte, car Je désire entendre sa voix et son appel "».

Ici il est clairement question de retarder l'exaucement de la Prière de demande du priant. Dans un autre hadith, l'Imam al-Sâdiq (p) dit :

«Le Jour du Jugement Allah s'adresse au serviteur pieux et lui dit : "O Mon serviteur! Tu M'as fait une demande et J'ai retardé la satisfaction de ta demande, Je te récompense pour cela par ceci et ceci..."».

Ici, la satisfaction de la Prière de demande est épargnée pour la Vie future.

Or dans les deux cas le serviteur gagne deux choses: dans le cas du retardement de la satisfaction de son besoin, il aura finalement (même avec un peu de retard) gain de cause pour son besoin terrestre, d'une part, et il est honoré, et c'est cela qui est le plus important, par le privilège d'être attentivement écouté par le Créateur, d'autre part. Dans le cas de l'ajournement de la satisfaction de son besoin jusqu'au Jour du Jugement, il a la haute satisfaction d'être écouté par Allah, d'une part, et il aura la récompense spirituelle qui lui servira d'épargne pour la Vie future, d'autre part. Ainsi dans tous les cas le retard de l'exaucement de la Prière de demande est au bénéfice du priant. Donc, pour un homme dans le besoin, dans la détresse et aux abois, quel meilleur soulagement, quel meilleur apaisement que de se sentir écouté par le Pourvoyeur absolu des besoins, à travers la Prière de demande qu'il accomplit !

Avant de souligner d'autres avantages découlant du retard de l'exaucement du do'â', notons que certains Textes islamiques nous recommandent d'insister auprès d'Allah pour qu'Il satisfasse nos demandes, et de ne pas hésiter à les répéter inlassablement, et certains autres nous mettent en garde contre notre hâte de vouloir voir nos prières exaucées et contre toute manifestation de signes d'impatience lorsque nous n'obtiendrions pas la satisfaction immédiate de nos besoins ou requêtes. Quelles conclusions faudrait-il tirer de ces deux recommandations :

1- insister et persévérer dans nos Prières de demande ?

2- éviter de nous empresser de vouloir l'exaucement rapide de nos prières ?

Écoutons ce que l'Imam al-Sâdiq (p) dit pour tenter d'obtenir un début de réponse à cette interrogation :

«Allah a pétri de Foi certains croyants, de sorte qu'ils n'apostasient jamais. Mais d'autres croyants ont la Foi hésitante. Ceux-ci, s'ils se livrent toutefois à l'imploration et y persistent, ils mourront croyants».

L'Imam répartit ici les croyants en deux catégories: ceux qu'Allah a pétris de Foi et ceux à la Foi hésitante. Les premiers sont assurés de mourir en croyants, puisqu'ils ont la propriété de ne jamais apostasier, les seconds pourront s'assurer une mort en croyants par la persistance dans le do'â'. Or, cette persistance dans le do'â' est la conséquence du retardement de l'exaucement de leur prière de demande. On a donc là, un autre avantage du retardement de l'exaucement du do'â', retardement qui incite le croyant à persister dans sa Prière de demande et à s'assurer de la sorte, qu'il mourra en croyant. Ceci est d'autant plus important, que nous aspirons tous à mourir en croyants, mais sans être certains si nous faisons partie de la première catégorie de croyants, ceux que l'Imam al-Sâdiq (p) qualifie de «pétris de Foi» et qui mourront certainement croyants, ou de la seconde catégorie, «ceux à la Foi hésitante» dont l'acte de la persistance dans le do'â' leur assure la mort en croyants.

Toutefois la persistance dans le do'â' n'est-elle pas un acte recommandé en soi, et en général, abstraction faite et indépendamment de son exaucement ou non ? Pourquoi dès lors en faire la conséquence spécifique du retardement ou de l'ajournement de la satisfaction de besoins ou de requêtes ?

Il est indubitable que la persistance dans do'â' est en soi un acte très recommandé, mais si nous l'avons liée au retardement de son exaucement, c'est pour attirer l'attention sur l'aspect positif de ce retardement, car lorsque nous constatons que notre Prière n'est pas exaucée, nous avons tendance à la recommencer jusqu'à ce que nous obtenions satisfaction. C'est du moins ce que nous suggèrent les Textes islamiques, dont nous citons un Hadith de l'Imam al-Sâdiq (p), rapporté par l'un de ses compagnons, qui témoigne : «J'ai demandé à Abî Abdullah (l'Imam al-Sâdiq) :

- Arrive-t-il qu'Allah accède à la demande d'un homme qui L'implore de satisfaire son besoin, tout en remettant à plus tard la réalisation de son voeu?

- Oui, m'a-t-il répondu.

- Pour quelle raison ? Est-ce pour qu'il fasse davantage de do'â' ?

- Oui, affirma-t-il.

D'autres Textes expliquent que certains serviteurs ont tendance à cesser d'accomplir la Prière de demande une fois leur demande satisfaite, et à la recommencer dans le cas contraire. Par conséquent le retardement de la satisfaction de la demande conduit le priant à reprendre le do'â' et à y persévérer jusqu'à ce qu'il meure en croyant, et c'est ce à quoi aspirent le plus, en fin de compte, tous les serviteurs.

Ceci concerne la persévérance dans le do'â'.

Venons-en à présent à la seconde partie de notre interrogation: pourquoi les Textes islamiques nous mettent-t-ils en garde contre notre empressement de vouloir voir notre do'â' exaucé et contre notre impatience ou désespoir face à l'ajournement de cet exaucement ? Ou en d'autres termes quel rapport y a-t-il entre cette mise en garde et les donnes subséquentes à l'ajournement de l'exaucement du do'â' ?

Écoutons à ce propos la recommandation suivante de l'Imam al-Sâdiq (p) ; elle nous servira de premier élément de réponse à cette question :

- «Tout va bien pour le croyant, et il peut compter sur la Miséricorde d'Allah, tant qu'il ne s'empresse pas, et qu'il ne tombe pas dans le désespoir au point de cesser de faire le do'â'».

- Et comment s'empresse-t-il ?, lui demanda un compagnon.

- «En disant : j'ai prié pour ceci et cela, mais je n'ai pas été exaucé», répondit l'Imam (p).

Maintenant, si on médite bien ce hadith, nous pouvons en déduire que le retardement de l'exaucement de la Prière de demande s'inscrit en fin de compte dans l'intérêt du priant, puisque le hadith dénote que le croyant demeure couvert par la Bonté et la Miséricorde d'Allah tant qu'il ne désespère pas et qu'il ne cesse pas de prier.

Mais de ce hadith ne peut-on pas inférer également que le non-exaucement du do'â' équivaudrait à éviter au priant les préjudices -spirituels ou matériels - qu'il pourrait subir, subséquemment à l'exaucement de sa Prière de demande, étant donné qu'il ignore ce que la satisfaction de sa demande pourrait entraîner ? Les Textes islamiques que nous allons exposer permettent de répondre par l'affirmative.


* * *


En effet, les différents do'â' que nous récitons, les divers Textes légaux que nous rencontrons nous indiquent clairement qu'aussi bien le non-exaucement du do'â' que le retard de l'exaucement est dans l'intérêt du priant, étant donné qu'Allah sait certainement mieux que nous nos intérêts imprévisibles ou les mauvaises conséquences que pourrait avoir ce qui nous semblerait de prime abord dans notre intérêt. D'autre part, il faut nous rappeler ce que nous avons déjà remarqué, à savoir que l'exaucement du do'â' (acquérir une grande fortune par exemple) entraîne de nouvelles charges et responsabilités (le prélèvement des multiples droits obligatoires et recommandés sur la richesse acquise, entre-autres). Il ne faut pas perdre de vue, ensuite, qu'Allah octroie aux serviteurs ce qui correspond le mieux à l'intérêt de chacun. Il y a enfin une autre cause importante du non-exaucement du do'â' que nous révèle le Hadith suivant du Prophète (P) :

«Il n'est pas un Musulman qui prie Allah (pour une faveur) sans qu'Il ne lui accorde l'une des trois choses suivantes : soit Il exauce promptement sa prière, soit Il l'épargne pour lui, soit Il éloigne de lui un malheur équivalent à la faveur demandée».

Ce qui nous importe dans ce Hadith, c'est la troisième et dernière partie, c'est-à-dire que faute d'exaucer le voeu du solliciteur, Allah écarte de lui un malheur.

Or, il ne fait pas de doute que l'éloignement d'un préjudice ou d'un malheur est préférable à l'apport d'un intérêt ou à l'obtention d'un avantage. C'est là une règle de bons sens que personne ne saurait contester. Ainsi, supposons qu'un croyant prie Allah de lui faire gagner une somme d'argent, et qu'Allah exauce son voeu. Supposons ensuite que ce croyant soit affligé par la suite par une maladie incurable, un événement tragique ou d'autres épreuves insupportables. À quoi lui servirait alors la fortune gagnée ? Cette fortune ne pourra ni le guérir de sa maladie, ni le mettre à l'abri de l'événement tragique, ni le sortir des épreuves insupportables. Or, en lui évitant un tel drame, Allah lui aurait accordé une faveur certainement plus appréciable que la fortune qu'il demandait. Donc le non-exaucement du do'â' pourrait être un signe très positif et appeler le priant à faire preuve de reconnaissance envers Allah.

Ayant terminé d'aborder les causes du non-exaucement, du retardement, ou de l'ajournement de l'exaucement du do'â', nous allons passer maintenant aux facteurs qui conduisent à exaucer nos prières de demandes.

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