Dim05192024

mise a jour :Dim, 20 Aoû 2023 9pm

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L'economie Islamique N'est Pas Une Science

4- L'ECONOMIE ISLAMIQUE N'EST PAS UNE SCIENCE.


Chacune des doctrines économiques que nous avons exposées(17) forme une partie d'une doctrine complète qui traite des différents aspects et branches de la vie. Ainsi, l'Economie islamique est une partie de la Doctrine islamique qui englobe tous les secteurs de la vie ; l'Economie capitaliste est une partie de la démocratie capitaliste qui inclut dans sa vision organisationnelle l'ensemble de la société ; et il en va de même pour l'Economie marxiste, qui constitue elle aussi une partie de la doctrine marxiste qui cristallise toute la vie sociale dans son cadre spécifique.

Ces doctrines diffèrent dans leurs germes idéologiques fondamentaux et dans leurs racines principales d'où elles tirent leur âme et leur identité, et diffèrent par conséquent dans les caractères spécifiques que chacune d'elles présente.

 

Ainsi, l'Economie marxiste a, selon le marxisme, un caractère scientifique, car elle constitue, selon ses adeptes, une conséquence inévitable des lois naturelles qui dominent l'Histoire et la mènent à leur guise. En revanche, les tenants de la doctrine capitaliste ne considèrent pas celle-ci, nous l'avons vu précédemment(18), comme un résultat nécessaire de la nature et des lois de l'Histoire, mais comme une forme sociale qui concorde avec les valeurs pratiques et les idéaux auxquels ils souscrivent.

Pour ce qui concerne la Doctrine islamique, elle ne s'attribue pas un caractère scientifique, comme le fait le marxisme, mais elle n'est pas, non plus, dépourvue d'un fondement doctrinal ni d'une vision englobant les principes de la vie et de l'univers, comme c'est le cas du capitalisme.

Lorsque nous disons de l'Economie islamique qu'elle n'est pas une science, nous entendons que l'Islam se charge de l'appel à l'organisation de la vie économique, tout comme il traite tous les aspects de la vie, et qu'elle n'est pas une science économique à la manière de la science de l'Economie politique. En d'autres termes, elle est une révolution visant à bouleverser la réalité corrompue et à la transformer en une réalité saine, et non pas une interprétation objective de la réalité. Ainsi, lorsqu'elle propose le principe de la double propriété, par exemple, elle ne prétend pas par là expliquer la réalité historique d'une phase déterminée de la vie de l'humanité, ni refléter les lois naturelles de l'Histoire, comme le fait le marxisme lorsqu'il présente le principe de la propriété collective comme un état inévitable -et la seule explication- d'une phase déterminée de l'Histoire.

Sur ce plan, l'Economie islamique ressemble à l'Economie capitaliste doctrinale, en ceci qu'elle se veut une opération de changement de la réalité, et non pas une opération d'explication de cette réalité. La mission doctrinale vis-à-vis de l'Economie islamique est de découvrir l'image intégrale de la vie économique qui soit conforme à la Législation islamique, et d'étudier les idées et les conceptions générales qui se dégagent de cette image, telle que l'idée de la séparation de la forme de la distribution et de la qualité de la production, ainsi que bien d'autres idées semblables. Quant à la mission scientifique vis-à-vis de l'Economie islamique, son rôle intervient ensuite, et consiste à mettre en évidence le cours réel de la vie et les lois de ce cours dans le cadre d'une société islamique qui applique entièrement la Doctrine islamique. Ainsi, le chercheur scientifique doit-il prendre l'Economie doctrinale en Islam comme une base fixe de la société. Puis il doit essayer de l'interpréter et d'en lier les événements les uns aux autres. En cela, l'Economie doctrinale islamique ressemble à l'Economie politique dans laquelle les économistes capitalistes, après avoir fini de poser leurs lignes doctrinales, se sont mis à interpréter la réalité dans le cadre de ces lignes, et à étudier la nature des lois qui régissent la société dans laquelle elles sont appliquées. C'est de cette étude qu'est née la science de l'Economie politique. Et c'est de cette manière que peut se constituer une science de l'Economie islamique, c'est-à-dire après qu'on l'aura étudiée d'une façon doctrinale complète à travers l'étude de la réalité dans ce cadre. La question qui se pose est de savoir quand et comment on peut constituer l'Economie islamique, à la manière dont les capitalistes ont fondé la science de l'Economie politique ou, en d'autres termes, la science économique qui interprète les événements de la société capitaliste.

La réponse à cette question est que l'explication scientifique de la vie économique repose sur l'une des deux choses suivantes :

1- Rassembler les événements à partir de l'expérience réelle de la vie, et les organiser d'une façon scientifique qui permette de découvrir les lois qui les régissent dans le domaine de cette vie et de ses conditions spécifiques.

2- Commencer la recherche scientifique à partir des axiomes que l'on suppose pour déduire à leur lumière la direction économique et le cours des événements.

L'explication scientifique faite sur la base du premier fondement dépend de l'incarnation de la doctrine dans une entité réelle et effective, car cela permettrait au chercheur d'enregistrer les événements de cette réalité et d'en déduire leurs phénomènes et lois généraux. C'est exactement le résultat obtenu par les économistes capitalistes lorsqu'ils ont vécu dans une société qui croit au capitalisme et qui l'applique, et qu'ils ont pu ainsi fonder leurs théories sur les expériences de la réalité sociale qu'ils avaient vécues. Mais de telles conditions ne s'offriront pas aux économistes islamiques tant que l'Economie islamique restera écartée de la scène de la vie, car ils n'ont pas aujourd'hui dans leur vie des expériences tirées de l'application de l'Economie islamique, pour qu'ils puissent percevoir, à leur lumière, la nature des lois qui régissent une vie sociale fondée sur l'Islam.

Quant à l'explication scientifique faite sur la base du second fondement, on peut l'utiliser pour éclairer certaines vérités qui caractérisent la vie économique dans la société islamique, et ce en commençant par des points doctrinaux précis dont on suit les conséquences dans le domaine de l'application supposée, et en terminant par la formulation des théories générales sur l'aspect économique de la société islamique, à la lumière de ces points doctrinaux.

Ainsi, le chercheur islamique peut, par exemple, dire que les intérêts commerciaux concordent, dans la société islamique, avec les intérêts des financiers et des banquiers, car la banque dans la société islamique repose sur la société en commandite et non sur l'usure. Elle fait du commerce avec l'argent de ses clients et partage avec eux les bénéfices réalisés, selon un pourcentage déterminé. Et, en fin de compte, sa situation financière dépendra du gain commercial qu'elle réalisera, et non pas des intérêts qu'elle prélèverait sur les dettes. Ce phénomène, le phénomène de concordance des intérêts des banques et des intérêts du commerce, est, de par sa nature, un phénomène objectif, que le chercheur déduit à partir d'un point, à savoir l'abolition du système usuraire des banques dans la société islamique.

En partant d'un tel point, le chercheur peut aussi constater un autre phénomène objectif, à savoir que la société islamique est débarrassée d'un facteur principal des crises qui secouent la vie économique dans la société capitaliste ; en effet, les cycles de la production et de la consommation dans une société fondée sur l'usure sont entravés par cette grande partie de la fortune populaire que les gens épargnent en vue d'en tirer un intérêt usuraire, et qui influe très négativement sur les cours de la production et de la consommation, et conduit à un marasme dans une grande partie de la production sociale des marchandises capitalistes et de consommation. Par contre, dans la société fondée sur l'Economie islamique, où l'intérêt usuraire est catégoriquement interdit, et la thésaurisation empêchée, soit par son interdiction, soit en la pénalisant par des impôts, tout le monde aura tendance à dépenser sa fortune.

Dans ce genre d'interprétation, nous supposons l'existence d'une réalité sociale et économique reposant sur des fondements donnés, et nous nous appliquons à interpréter cette réalité supposée et à en découvrir les caractéristiques générales à la lumière de ces fondements.

Mais ces interprétations ne nous fournissent pas avec précision la conception scientifique globale de la vie économique dans la société islamique, si les matériaux de l'étude scientifique ne sont pas tirés de l'expérience de la réalité sensible. Il arrive souvent qu'il y ait des différences entre la vie réelle d'un système et les interprétations qu'on fait de cette vie, fondées sur des suppositions. C'est ce qui est arrivé avec les économistes capitalistes qui, après avoir échafaudé beaucoup de leurs théories analytiques sur une base conjecturelle, sont parvenus à des résultats contredisant la réalité qu'ils vivaient, car plusieurs facteurs qui n'avaient pas été prévus dans le domaine de l'hypothèse ont été découverts dans celui de la vie réelle.

A cela, il faut ajouter que l'élément spirituel et intellectuel, ou en d'autres termes le tempérament psychologique général de la société islamique, exerce une grande influence sur le cours de la vie économique. Or, ce tempérament n'a pas un degré déterminé ni une formule précise que l'on puisse présupposer et sur la base desquels on échafauderait les différentes théories.

L'Economie islamique ne peut donc naître vraiment que si elle est incarnée, avec ses racines, ses aspects et ses détails, dans l'entité de la société, et que les événements et les expériences économiques qu'elle traverse sont étudiés régulièrement.


Notes


17. Dans la première partie de "Iqtiçâdonâ".

18. Dans la première partie de "Iqtiçâdonâ".

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