La Fondation de Sibtayn

5. L’ampleur de Nahj al-Balaghah

L’un des aspects séduisants de Nahj al-Balaghah qui attire l’esprit de chaque penseur est que son contenu, dans chaque domaine traité, aborde si précisément et exactement le sujet de la discussion qu’on penserait que ce dernier est le seul sujet de la recherche du locuteur. En effet, lorsque l’Imâm (as) commence une discussion sur l’unicité divine et décrit les noms et les caractéristiques de la beauté divine, on pense qu’un grand philosophe divin s’est incarné devant nous.

Un philosophe a parlé pendant des années sur l’unicité mais ne la décrit ni par la voie de l’incarnation ni par l’énumération des attributs divins. L’Imam (as) présente Dieu d’une manière que l’homme, à l’aide des yeux de son esprit, Le trouve présent dans les profondeurs de son âme; ainsi son âme sera remplie des lumières de la connaissance divine. Quand l’Imam Ali (as) parlait au sujet de la guerre (Djihad), nous apercevons un commandant brave qui s’est vêtu de la cuirasse et qui décrit précisément les ordres et les tactiques guerriers pour ses officiers et ses soldats.

Il parlait en ce temps-là comme un spécialiste de la guerre, une personne qui pendant toute sa vie avait eu seulement affaire au champ de bataille et aux tactiques du combat. Parfois on le trouvait prendre les rênes du gouvernement pour orienter la communauté musulmane. On l’aperçoit en train de décrire les principes gouvernementaux pour ses commandants et ses gouverneurs de province.

A ce moment, il décrit les mystères de la dégradation et de la grandeur des civilisations et il explique la manière d’atteindre la tranquillité sociale et politique par des phrases tellement expérimentées qu’on penserait qu’il parle du domaine spécialisé de sa Recherche. Quand on feuillette Nahj al-Balaghah, on voit l’Imâm (as) en train d’enseigner et d’éduquer les gens dans le domaine de la purification des esprits. En fait, il inspire aux gens l’âme de la spiritualité et il apaise leur soif et leur envie de connaître la spiritualité.

Un homme affranchi des désirs du monde nommé Homm-am a demande à l’Imam Ali (as) d’expliquer les caractéristiques des hommes pieux et vertueux; l’Imâm (as) lui ouvre les portes de sa connaissance et lui explique, pendant un cours sur la vertu, à peu près cent attributs du caractère des vertueux et tout cela dans des phrases solides, profondes et influentes. Il parle aux ascètes du chemin de la vérité d’une manière qu’on penserait qu’il enseignait sur cette même chaire depuis des siècles. A vrai dire, cette ampleur de Nahj al- Balaghah dans les différents domaines, qui composent chacune une section particulière et qui sont incomparables (ou bien il en existe peu de semblables) est l’un des plus miraculeux aspects de ce livre.

Le célèbre commentateur de Nahj al-Balaghah, Ibn Abi al-Hadid, écrit sur ce point:

«و إن‍ى لأطيل التعجّب من رجل يخطب في الحرب بكلام يدّل علي أن طبعه مناسب لطباع الأسود و النمور و أمثالهما من السباع الضارية ثم يخطب في ذلك الموقف بعينه إذا أراد الموعظة بكلام يدل علي أن طبعه مشاكل لطباع الرهبان لابسى المسوح الذين لم يأكلوا لحماً و لم يريقوا دماً فتارة يكون في صورة بسطام‌بن‌قيس الشيبان‍ى و عتيبة‌بن‌الحارث اليربوع‍ى و عامر‌بن‌الطفيل العامرى و تارة يكون في صورة سقراط الحبر اليونان‍ى و يوحنا المعمدان الإسرائيلى و المسيح‌بن‌مريم» ([29])

«Je suis très étonné du comportement d’un homme qui, dans le champ du bataille, fait un discours qui témoigne de sa nature de lion, brave et courageux, alors que ce même homme, lorsqu’il décide de donner des conseilles et des maximes, fait sortir de sa bouche des paroles qui ressemblent à celles des moines vivant dans les couvents et qui, ayant une nature douce et tranquille, n’a égorgé jamais d’animal et n’a jamais mangé la chair. Ce même homme s’incarne parfois dans le visage de Bostam ibn Gheys et Atibah ibn Haris et Amir ibn Tofaylet parfois il se transfigure dans le visage de Socrate, le savant ou bien Yu-Hanna ou encore Jésus-Christ, le fils de Marie.»([30]) Dans un autre long discours, Ibn Abi al-Hadid a dit:

«Allah soit loué, qui a offert à cet homme exemplaire, tant d’avantages précieux, comment est-ce possible qu’un jeune arabe de la Mecque qui a vécu seul dans cette ville et qui n’avait aucun rapport avec les philosophes, a pu avoir plus de connaissances que Platon et Aristote dans le domaine de la science et de la théologie; il ne fréquentait aucun des savants du domaine de la morale et du mystici-sme et pourtant il était supérieur à Socrate.

Il n’était pas élevé parmi les courageux, car, les habitants de la Mecque ne s’occupaient que de commerce et non pas de la guerre et pourtant il était le plus courageux des hommes sur terre.» Le célèbre écrivain et le grand guide spirituel sunnite, Cheikh Mohammad Abdah, a écrit sur ce point de belles phrases qui sont très expressives et évidentes: «Au moment de la lecture de Nahj al-Balaghah, lorsque je finissais une section pour en commencer une autre, j’avais le sentiment que les paysages changeaient.

Parfois je me trouvais dans un monde où les plus profondes significations, portant les plus belles parures de phrases,se tournaient autour des âmes purifiées et s’approchaient des cœurs vertueux et purs, en leur montrent la Voie Droite et le chemin qui touche au but final. Elles leur interdisent les péchés et les orientent vers les chemins de la perfection et du savoir. Parfois je vois, à travers les pages de ce livre, des visages en colère qui, tous, à mains armées,sont prêts à attaquer l’ennemi.Ces figures, de fin de guerre, occupant facilement les cœurs prêts à se convertir, pénètrent sans la moindre difficulté dans les souvenirs mais en même temps, effacent de toute leur puissance, de faux rêves et des pensées perverties.

Parfois, Nahj al-Balaghah se sépare des aspects divins, s’approche de l’âme humaine et s’unit à elle et comme une raison lumineuse qui n’a aucune ressemblance aux créatures terrestres, fait sortir l’âme humaine des obscurs rideaux de la nature et l’oriente vers le Monde Supérieur et après avoir fait détacher les hypocrisies et les fautes, il le fait séjourner dans l’Au-delà.

Quelquefois à travers la lecture de Nahj al-Balaghah, j’entends de mes propres oreilles des maximes et des sentences qui s’adressent aux savants et aux directeurs de société, leur montrant la Voie Droite, leur interdisant les fautes et les orientant dans les cas où règne le doute, les dirigeant précisément dans les cas politiques et leur apprenant les meilleures leçons dans le domaine de la pensée, de la sagacité et du gouvernement.»([32])

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