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Chapitre12 Abû tharr et `othmân

Chapitre12

Abû tharr et `othmân


Al-`Allâmah al-Subaytî, entre autres, écrit qu'Abû Tharr resta à Médine après la mort de `Omar. Il remarquait combien `Othmân avait un faible pour les Omayyades dont l'influence et le pouvoir grandirent considérablement sous son règne, réussissant même à transformer l'aspect de l'Etat islamique qui ressemblait de plus en plus à un royaume par les magnificences et les somptuosités qu'il affichait. Les élites vivaient dans le luxe et la pompe et menaient une existence très somptueuse. Les gens devinrent friands de gains matériels. Abû Tharr remarqua aussi que la majorité des Compagnons avaient complètement changé. Al-Zubayr, Talhah et `Abdul-Rahmân Ibn `Awf (qui s'étaient réconciliés avec le gouvernement) par exemple, acquirent des maisons et des terrains. Sa`d Ibn Abî Waqqâç avait des agates fixées dans son palace qu'il avait élevé très haut, et dont il élargit la cour dans laquelle il avait érigé une tourelle.

Abû Tharr qui avait connu de très près le mode de vie du Prophète et assimilé à côté de lui tous les principes de l'Islam et ses recommandations ne put supporter toute cette déviation de l'Etat islamique et de ses dirigeants. Il se souleva ouvertement pour condamner sans détour tout ce qui était islamiquement condamnable. Il n'était pas quelqu'un à accepter l'intimidation du Calife ou des hommes forts du pouvoir. Il se mit à appeler les gens à plus de retenue dans les dépenses et à plus d'austérité, n'hésitant pas à s'en prendre à `Othmân qu'il tenait pour premier responsable de ces écarts de l'Etat islamique.

Un jour il apprit que `Othmân venait d'attribuer à Marwân Ibn al-Hakam, le cinquième du tribut payé par l'Afrique à Marwân Ibn al-Hakam, 300.000 dirhams à al-Harath Ibn al-`آç, 100.000 dirhams à Zayd Ibn Thâbit, une grande partie du butin de l'Afrique à son frère de lait, `Abdullâh Ibn Abî Sarah, et le terrain de Fadak - appartenant de jure à Fâtimah al-Zahrâ', la fille du Prophète, à Marwân. Aussi se mit-il à réciter publiquement dans le masjid ce verset coranique:

 

«Annonce un châtiment douloureux à ceux qui thésaurisent l'or et l'argent sans rien dépenser dans le chemin d'Allah» (Sourate al-Tawbah, 9:34)

Marwân apprit qu'Abû Tharr l'avait attaqué sans ménager `Othmân. Il se plaignit auprès de ce dernier, lequel ordonna à son esclave de convoquer Abû Tharr. Celui-ci se présenta au Calife. En le voyant `Othmân dit: «Abû Tharr! Cesse de dire ce que j'ai entendu, autrement il n'y aurait personne de plus inamical que moi envers toi». Abû Tharr répondit: «O Commandeur! Qu'as-tu entendu à propos de moi?». `Othmân dit: «Je viens d'apprendre que tu incites les gens contre moi». Abû Tharr demanda: «De quelle façon?». `Othmân répondit: «Tu récites le verset coranique, "Annonce un châtiment... etc." dans le masjid». Abû Tharr dit: «O Commandeur! Est-ce que tu veux m'empêcher de réciter le Livre d'Allah et de dénoncer les méfaits de ceux qui ont abandonné les Commandements d'Allah! Par Allah, je ne saurais offenser Allah pour faire plaisir à `Othmân. Le mécontentement de `Othmân est meilleur pour moi que le mécontentement d'Allah».

En entendant Abû Tharr, `Othmân le regarda de travers, mais il ne put trouver un argument pour réfuter l'accusation de son interlocuteur. Aussi se contenta-t-il de ne rien dire et resta silencieux. Abû Tharr se leva et quitta le lieu, plus déterminé que jamais à continuer de critiquer ceux qui agissaient d'une façon contraire aux Commandements d'Allah.

Abû Tharr continua donc d'attaquer `Othmân plus fréquemment et chaque fois qu'il s'écartait des principes islamiques. Le Calife devint très mécontent de l'audace de cet illustre Compagnon intouchable et indomptable. Aussi, attendit-il l'occasion de le proscrire. Un jour l'occasion se présenta et `Othmân ne manqua pas de la saisir.

En effet, selon Ibn Wâdhih, l'auteur de "Ta'rîkh al-Ya`qûbî", les gens informèrent le 3e Calife qu'Abû Tharr l'avait persiflé dans le masjid où il avait tenu ce discours:

«O gens! Ceux qui me connaissent me reconnaissent, et ceux qui ne me connaissent pas, qu'ils sachent que je suis Abû Tharr al-Ghifârî. Mon nom est Jundab Ibn Junâdah al-Rabadhî. Allah a exalté Adam, Nûh, la progéniture d'Ibrâhîm et les enfants de `Imrân et les plaça au-dessus de l'humanité. Le Prophète Mohammad est l'héritier du savoir d'Adam et de toutes les vertus qui ont distingué les Prophètes. Et l'Imam `Ali Ibn Abî Tâlib est le successeur du Prophète et l'héritier de son savoir.

»O gens déroutés! Si après la disparition du Prophète vous aviez donné la préférence à celui qu'Allah avait préféré, et placé dernier celui qu'Allah avait placé dernier, et que vous aviez laissé le gouvernement et la succession à leurs ayants droit, les Ahl-ul-Bayt, vous auriez obtenu d'innombrables bénédictions de par-dessus de vos têtes et d'en dessous de vos pieds, et aucun ami d'Allah n'aurait été pauvre ou indigent. Aucune partie des obligations divines n'aurait été négligée, ni aucune dispute entre deux individus n'aurait éclaté à propos d'un Commandement Divin pour la simple raison qu'ils auraient trouvé la juste explication de ce Commandement dans le Livre d'Allah et les Traditions du Prophète, tels qu'ils sont expliqués par les Gens de la Maison du Prophète (Ahl-ul-Bayt). Mais puisque vous avez fait délibérément ce que vous n'auriez pas dû faire, vous devez pâtir des conséquences de votre méfait, et bientôt ceux qui ont été injustes sauront à qui ils retourneront».

Il est noté dans le même livre d'histoire que `Othmân apprit également qu'on l'accusait publiquement d'avoir apporté des modifications à la Sunnah du Saint Prophète et aux traditions d'Abû Bakr et de `Omar, alors que sa nomination à la tête de l'Etat était fondée sur son engagement de suivre les traditions de ses deux prédécesseurs.

`Othmân, convaincu que les reproches publics que les Musulmans lui faisaient, concernant sa façon de gouverner, étaient dus à l'audace et aux discours de l'incorruptible Abû Tharr, proscrit ce dernier en Syrie, pour être sous le contrôle de Mu`âwiyeh, le gouverneur de cette province. Selon "Ta'rîkh `Abul-Fidâ", la déportation eut lieu en l'an 30 de l'Hégire.

Selon les historiens, étant donné qu'Abû Tharr avait continué à critiquer les actes de violation des Lois islamiques, `Othmân avait tout d'abord pensé pouvoir limiter l'influence de l'illustre Compagnon du Prophète en lui imposant des restrictions sévères. Ainsi, il avait décrété l'interdiction à toute personne de parler à Abû Tharr, de s'approcher de lui ou de le fréquenter. Pour proclamer cet ordre de mise au ban de la société concernant Abû Tharr, des réunions publiques avaient été organisées à plusieurs reprises.

A ce sujet, al-`Allâmah al-Majlicî et al-`Allâmah al-Subaytî écrivent que le nommé al-Ahnaf Ibn Qays avait l'habitude de venir s'asseoir dans le masjid. Un jour, il fit la prière suivante: «O Seigneur! Remplace mon insociabilité par l'amour, et ma solitude par une compagnie, et présente-moi un compagnon d'un mérite inégalable». ہ peine eut-il fini de prononcer cette prière, il vit un homme assis dans le coin du masjid et occupé à l'adoration d'Allah. Il se leva, se dirigea vers lui et s'assit à côté de lui. Puis il lui dit: «Qui es-tu et quel est ton nom». L'homme répondit: «Jundab Ibn Junâdah». En l'entendant, il s'écria: «Allah est Grand! Allah est Grand!». Abû Tharr (Jundab) lui demanda: «Pourquoi récites-tu ce takbîr (Allah est Grand)». Al-Ahnaf répondit: «Lorsque je suis entré dans le masjid aujourd'hui, j'ai prié Allah de me présenter le meilleur compagnon. IL a donc exaucé ma demande très rapidement et m'a accordé l'honneur de te rencontrer». Abû Tharr dit alors: «Je dois glorifier Allah plus que toi, pour m'avoir jugé être un compagnon convenable. Ecoute-moi! Le Saint Prophète m'avait informé que toi et moi, nous serons portés vers un endroit très élevé et que nous y resterons jusqu'à ce que tout le monde ait terminé de rendre des Comptes». Et Abû Tharr d'ajouter: «O serviteur d'Allah! Eloigne-toi de moi, autrement tu auras des ennuis». Al-Ahnaf lui demanda: «Comment cela, mon ami?». Abû Tharr expliqua: «`Othmân Ibn `Affân a décrété que quiconque me rencontre, me parle ou s'assied avec moi, sera puni»(43).

En bref, `Othmân se dégoûta de la véracité et de la franchise d'Abû Tharr, lequel malgré les restrictions qui lui avaient été imposées continua à dénoncer les violations des Lois islamiques. N'ayant pas réussi à le réduire au silence, `Othmân décida de le bannir en Syrie.
 

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